LE CRISTAL, LA PIERRE DES DIEUX
En attendant, le cristal est un embryon, naît de la terre et du roc. Selon la minéralogie indienne, il se distingue du diamant par son degré de maturité embryologique. En quelque sorte, le cristal n’est qu’un diamant insuffisamment mûr.
Et l’on continue dans la symbolique Verseau avec sa transparence qui est un des plus beaux exemples d’union des contraires : le cristal bien qu’il soit matériel, permet de voir à travers lui, comme s’il n’était pas matériel. Il représente le plan intermédiaire entre le visible et l’invisible.
« Il est le symbole de la divination, de la sagesse et les pouvoirs mystérieux accordés à l’homme. Ce sont des palais de cristal que les héros de l’Orient ou de l’Occident rencontrent au sortir des sombres forêts dans leur quête d’un talisman royal. Une même croyance unit le quartz tjuringa des initiés australiens au Saint-Graal de la chevalerie occidentale taillé dans l’émeraude mystique (serh, 102-103) ».
On peut rapprocher de ce point de vue celui du chamanisme océano-australien, voire nord-américain, qui fait du cristal de roche des pierres de lumière, détachées du Trône céleste, et des instruments de la clairvoyance du chaman. A Bornéo, le chaman Dayak utilise, pour découvrir, l’âme du malade, différents objets magiques, dont les plus importants sont des cristaux de quartz : bata ilau, ou pierre de lumière.
A Dobu en Mélanésie, le guérisseur perçoit dans le cristal la personne qui a provoqué la maladie, qu’elle soit vivante ou trépassée.
En Australie, les cristaux de roche, qui jouent un rôle important dans l’initiation de l’homme-médecine, sont d’origine céleste. Ils sont fréquemment considérés comme des fragments détachés du trône de l’Être suprême céleste. Même croyance chez les Negritos de Malacca. Chez les Semang et les Dayaks, les chamans ont des pierres-lumière, qui reflètent tout ce qui arrive à l’âme du malade et, partant, où elle se trouve égarée. Chez les Negritos, le guérisseur voit aussi la maladie dans les cristaux. Ces cristaux sont censés habités par des esprits qui lui montent la maladie.
En étroite relation avec le serpent-arc-en-ciel, ils octroient la faculté de s’élever au ciel. Même symbolisme chez les Indiens d’Amérique. Le cristal est ainsi considéré comme une substance sacrée d’origine ouranienne, comportant des pouvoirs de clairvoyance, de sagesse, de divination et de capacité à voler. Les hommes-médecine d’Australie et d’ailleurs rattachent d’une manière obscure leurs pouvoirs à la présence, à l’intérieur même de leurs corps, de ces cristaux.
Les pierres transparents ou translucides telles que le cristal de roche, ou quartz, l’obsidienne, la diorite du Sud, sont employées traditionnellement chez les Indiens de la Prairie comme talismans et producteurs de vision : ils facilitent la transe, laquelle permet la perception de l’invisible.
Chez les Navaho, c’est le cristal de roche qui, le premier, élève le soleil, illuminateur du monde.
Chez les Mayas, des prêtres lisaient l’avenir dans des fragments de cristal de roche immergés dans une coupe d’hydromel, pour qu’il éveille la conscience.
Dans la chrétienté, la lumière pénétrant le cristal est une image traditionnelle de l’Immaculée Conception : « Marie est un cristal, son fils, la lumière céleste ; ainsi la traverse-t-il toute sans pourtant la briser » (Angelus Silesius). Aussi, avant de devenir des instruments divinatoires, les boules de cristal étaient-elles un objet de vénération ; les Écossais les appelaient «pierres de victoire».
Les messagères de l’Autre Monde celtique, selon la majorité des textes irlandais, viennent sous forme d’oiseaux ; mais quand elles viennent par mer, elles utilisent des bateaux de verre ou de cristal. Ces matériaux symbolisent apparemment une perfection technique inaccessible à l’industrie humaine. Ou bien la transparence du navire de cristal symbolise l’immatérialité même du voyageur et le caractère tout spirituel de sa mission. Les Elfes, comme Cendrillon, avaient des sandales de cristal ou de verre.
Une interprétation psychanalytique du Palais de cristal s’appuie notamment sur le conte de Perrault : Gracieuse et Percinet. Perdue dans une sombre forêt, tombée à terre d’épuisement, invoquant Percinet : « Est-il possible que vous m’ayez abandonnée ? »
Gracieuse aperçut un palais tout de cristal qui brillait autant que le soleil… Reçue dans ce palais de féerie, elle fut menée dans une grande salle, dont les murs étaient de cristal de roche… Toute son histoire y était gravée, et chacun de ses actes s’inscrivait sur ces murs de cristal.
Tel est le symbolisme du Palais de cristal et, plus généralement, de tout palais surgissant de terre à la volonté des fées. Le conte en fait l’habitacle des images gravées dans notre inconscient et qui racontent, à travers nous, l’histoire du monde. Pour les initiés, les images ancestrales s’impriment dans la substance lumineuse du corps astral, ultime enveloppe de l’âme, d’où leur nom de clichés astraux. Ceux-ci renaissent d’existence en existence et perpétuent à travers les siècles des fantasmes appartenant aux époques et aux milieux les plus divers.
Corps astral, inconscient collectif, quel que soit le substrat de l’image, le palais de cristal semble bien appartenir aux archétypes du rêve et de la rêverie.
Dans le folklore français, les noces de cristal correspondent à 15 ans de mariage.
Source: Dictionnaire des symboles (1ère édition 1969 ; édition revue et corrigée Robert Laffont, 1982) de Jean Chevalier et Alain Gheerbrant,
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